Mercredi 27, le « syndicat de la famille », qui n’est pas un syndicat, mais bien une résurrection nauséabonde de la Manif pour tous, organisait un rassemblement devant le Rectorat à Lyon pour s’opposer « au wokisme » et à la « transidentité ». Forcément, nous étions présent-e-s pour réclamer une réelle éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle. Elle est la garantie de l’apprentissage du respect de son corps, du respect du consentement dès l’enfance. Elle est l’un des outils pour apprendre le respect de la diversité des identités, et pour lutter contre la transphobie, et toutes les formes de sexisme et de LGBTphobies. Nous reproduisons ici la prise de parole unitaire co-écrite localement avec la FSU, la CGT Educ’Action et Sud Education. Le Planning Familial 69 était également représenté au rassemblement. Et vous trouverez ici le communiqué de Sud Education, à partager largement, sur les récentes déclarations du ministre… Nous étions 3 fois plus nombreuses-x du côté du consentement, du libre choix et de l’éducation, et les réactionnaires d’en face, petite satisfaction, n’ont pas été reçu par le Rectorat…
→ L’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, ou EVARS, est une obligation légale en France depuis la loi de 2001 : « une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d’au moins trois séances annuelles ». La sécurité et l’épanouissement relationnel et affectif des enfants sont des enjeux qui relèvent d’une coéducation entre les parents et l’école. Certains sujets ne sont pas toujours aisés à aborder à la maison, ou alors les enfants ne souhaitent pas les évoquer avec leurs familles.
Dès le plus jeune âge de l’enfant, cet enseignement participe à la connaissance de son anatomie et au respect de soi et de l’autre. Il apprend les conditions du consentement et du non-consentement, ce qui constitue le meilleur outil de prévention des violences. Et tout au long de la scolarité, il permet de repérer précocement toutes les formes de violences, de harcèlement et de cyberharcèlement.
Ces séances sont fondamentales pour prendre le temps d’écouter les élèves, de répondre à leurs questions, de nourrir leur réflexion mais aussi de mettre à leur disposition des informations objectives et scientifiques. Ainsi, ce programme d’EVARS contribue à construire de futurs adultes responsables, autonomes et respectueux-ses.
→ Pourtant, l’information et l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle ont bien du mal à trouver leur place dans les classes ! La loi n’est pas appliquée : le Planning familial a constaté, dans une enquête de novembre 2023, que 85% des élèves n’avaient pas accès aux 3 séances obligatoires par an.
Cette situation est préoccupante quand on connaît les faits suivants :
- les violences sexuelles, notamment l’inceste, touchent 160 000 enfants chaque année,
- 2/3 des enfants de moins de 15 ans et 1/3 des enfants de moins de 12 ont déjà eu accès à des images pornographiques,
- 44 % des jeunes ayant déjà eu un rapport sexuel déclarent avoir essayé de reproduire des scènes ou des pratiques vues dans des films ou vidéos pornographiques,
- les personnes lesbiennes, gays et bisexuelles sont 2 à 3 fois plus souvent exposées à des violences psychologiques, verbales, physiques ou sexuelles que les personnes hétérosexuelles ; les chiffres sont encore plus alarmants pour les personnes trans
• Le sexisme, l’homophobie et la transphobie augmentent, d’après un rapport de janvier 2024 du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes.
→ L’école doit jouer son rôle dans la protection des enfants en informant et en construisant des réponses éducatives et pédagogiques dans la lutte contre le sexisme, les LGBTIphobies et les violences sexuelles et sexistes.
Cependant, le ministère de l’Éducation nationale traîne : la publication des projets de programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS) a été retardée. L’ÉVARS n’est pas entrée en vigueur en cette rentrée 2024. Un projet de programme a pourtant été discuté en groupe de travail en mars dernier et aurait dû être présenté pour avis au Conseil supérieur de l’Éducation en juillet.
Dans le même temps, les réseaux d’extrême droite, réactionnaires et LGBTIphobes, se sont organisés pour s’opposer à ces nouveaux programmes d’EVARS. Ainsi le “syndicat de la famille”, issu du mouvement de la “Manif pour tous”, a organisé des actions devant certains rectorats. Il participe également depuis la rentrée à une campagne de désinformation dans les médias. Ceci a conduit certains comptes sur les réseaux sociaux à sous-entendre que les personnels prenant en charge l’EVARS étaient des pédocriminels !
La crainte de la mobilisation de l’extrême droite contre un enseignement émancipateur, destiné à protéger les enfants des violences, ne doit pas entraver l’action de notre ministère. Au contraire, il est impératif de publier ces programmes, de les expliquer aux parents d’élèves et de former les personnels. L’opacité et l’attente de la publication nourrissent le conspirationnisme et le militantisme des groupes réactionnaires qui y sont opposés : le ministère de l’Éducation nationale a une responsabilité pour empêcher l’obscurantisme de se propager. Il en va de la protection des personnels et des élèves !
→ Nos organisations syndicales exigent donc :
- l’application de la loi : 3 séances d’EVARS par an et par élève, grâce à de réels moyens pour les personnels de l’Éducation nationale et pour les associations
- la formation, sur temps de service, de tous les personnels (enseignant-es, AED, AESH, personnels administratifs) à l’EVARS et à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles
- la publication de nouveaux programmes d’EVARS, tout en maintenant notre liberté pédagogique et professionnelle
- la défense par le Ministère de ses personnels face aux attaques obscurantistes.
Nos corps ! Nos Choix !
Et de l’autre côté du rassemblement, les quelques « militant-es » du « syndicat » de la famille, bien protégé-e-s par la police nationale…