Ce communiqué a été publié le 14/11/2022
SUD éducation publie ce texte rédigé par un camarade syndicaliste à UCU, le principal syndicat des travailleurs et travailleuses des universités britanniques. Il y revient sur la vague de grèves qui traverse le Royaume-Uni depuis le printemps, portée par des revendications salariales face à l’inflation élevée et après plus d’une décennie de politiques d’austérité qui ont conduit au retour de la pauvreté de masse dans le pays. Les grèves, qui ont été jusqu’ici concentrées dans le secteur privé ou privatisé (chemin de fer, poste, docks, réseaux de transport en commun) et souvent couronnées de succès, s’étendent désormais aux services publics: dans la santé, les administrations publiques et l’enseignement supérieur. Ce dernier secteur a connu ces dernières années de nombreuses luttes locales contre les politiques néolibérales d’augmentation des droits d’inscription, de précarisation du personnel et de neutralisation de toute parole critique.
Les luttes ouvrières sont de retour au Royaume-Uni
La vague de grève qui traverse la Grande-Bretagne se poursuivra en décembre et des projets de grèves sont en cours d’élaboration pour 2023. Les grèves qui ont commencé en juin dans les chemins de fer se sont étendues à la poste, aux télécommunications, aux dockers de Liverpool, aux plates-formes pétrolières de la mer du Nord où les travailleurs et travailleuses font grève deux jours par semaine et à diverses usines à travers le pays, y compris sous la forme de grèves sauvages .
La mobilisation risque fort de se poursuivre puisque 150 établissements d’enseignement supérieur seront en grève, sous l’impulsion du syndicat UCU, pendant trois jours en novembre et en 2023. Il y a des scrutins engagés par les syndicats des pompiers, ceux du service public et de l’État, ainsi que dans la santé. Le Royal College of Nursing, le syndicat de la santé le moins militant par le passé, affirme que nombre de ses membres ont voté pour la grève.
Les syndicats de l’éducation organisent également un scrutin d’ici janvier, car les enseignant-e-s et le personnel administratif et technique ne se voient offrir qu’une augmentation de salaire de 5 %. La charge de travail augmente, les dépenses d’éducation sont réduites (en raison de l’augmentation des coûts de chauffage, du prix des livres, etc.) et on a davantage recours aux assistant-e-s d’enseignement. Le scrutin consultatif du NEU, qui compte 640 000 membres, a été très majoritairement favorable à la grève. Le NASUWT et le syndicat des directeurs d’école NAHT consultent également leurs adhérent-e-s. Au cours de la nouvelle année, un autre million de travailleurs et de travailleuses du secteur public pourraient être en grève.
Il y avait 3,9 millions d’enfants vivant dans la pauvreté au Royaume-Uni en 2020-2021. Cela représente 27 % des enfants, soit huit sur une classe de 30. 49 % des enfants vivant dans des familles monoparentales sont en situation de pauvreté, tout comme 46 % des enfants appartenant aux minorités ethniques. Ils ne mangent pas à leur faim et de nombreuses familles doivent réduire leurs dépenses et choisir entre manger et chauffer leur logement. Il est prévu de créer des « banques de chaleur » où les familles pourront se rendre pour se chauffer cet hiver. Ce développement alarmant à côté des « banques alimentaires » montre la profondeur de la décadence capitaliste en Grande-Bretagne.
Les travailleurs et travailleuses, et plus largement la population ont connu dix ans d’austérité, deux ans de COVID et une crise du coût de la vie qui s’aggrave chaque mois. Officiellement, l’inflation est supérieure à 10 %, mais en septembre, les prix des aliments essentiels avaient augmenté davantage sur l’année : huile de cuisson 65 %, beurre, pain, lait entre 20 et 40 %. Tandis que les prix de l’énergie ont augmenté de 300% (pour celles et ceux qui ont des contrats d’énergie variables et des compteurs à prépaiement). Les offres salariales se situent entre 2 et 5%. Certains groupes de travailleurs et travailleuses gagnent par la grève des augmentations de salaire de 11% ou plus.
La vague de grève et la crise économique ont fait tomber le Premier ministre conservateur Boris Johnson et créé une profonde crise gouvernementale: sa remplaçante Liz Truss a tenu sept semaines avant d’être contrainte à la démission. Le nouveau Premier ministre conservateur Rishi Sunak prévoit de frapper encore plus durement la classe ouvrière par un nouveau plan d’austérité. L’entassement d’immigrant-e-s dans des conditions déplorables dans un centre de détention a été un autre scandale démontrant l’ignominie du gouvernement, alors que le ministre de l’Intérieur parlait d’une invasion de la Grande-Bretagne par les immigrant-e-s. De telles politiques sont destinées à terroriser les immigrant-e-s. Les autorités ont « traité » le problème en jetant certains immigré-e-s dans les rues de Londres, sans hébergement. Cela a montré à la population que tous leurs plans capitalistes d’exploitation et d’oppression sont en crise.
Alors que le taux d’inflation augmente chaque mois, le gouvernement est dans le chaos mais promet encore plus d’austérité, des réductions des allocations et des salaires réels, tandis que la banque d’Angleterre a augmenté les taux d’intérêt à 3% – ce qui signifie plus d’inflation. Le Royaume-Uni entre en récession, en partie à cause des difficultés de l’économie mondiale et de la faiblesse de l’économie britannique.
Le parti travailliste ne soutient pas la grève. Son leader Keir Starmer a déclaré qu’il n’y aura pas de programme de nationalisation sous un gouvernement travailliste et qu’il ne soutient pas les piquets de grève.
Construire la vague de grève
Il y a un fort soutien au sein de la base des organisations syndicales en faveur de grèves nationales coordonnées. Le congrès du TUC (la confédération des syndicats), qui a été reporté au 18 octobre c’est-à-dire retardé de 6 semaines, a adopté trois motions visant à organiser des grèves coordonnées intersyndicales et intersectorielles – mais à partir du sommet et non de la base, alors qu’il faudrait créer des assemblées de travailleurs et travailleuses. Les motions ne donnaient aucune date. Cette semaine, les directions syndicales ont discuté de la coordination MAIS elles retardent et retardent encore.
Dans les syndicats de l’éducation, qui comprennent des syndicats de personnel administratif et technique comme Unite, Unison et GMB, la base commence à discuter de la coordination de leurs actions de grève. De tels mouvements sont essentiels et doivent être utilisés pour planifier de telles actions pour tous les syndicats qui prévoient ou entreprennent des actions de grève.
Il est essentiel d’approfondir les liens avec les travailleurs d’autres pays, comme la France, en développant un programme de solidarité internationale contre le gouvernement et les employeurs qui nous attaquent, en échangeant des expériences et en tirant des leçons des autres pays. Le TUC n’évoquera jamais la grève générale et pourtant certains syndicats français y sont favorables. Nous devons nous appuyer sur la force des autres.
Martin Ralph VP Liverpool TUC
Comité de l’UCU Université de Liverpool
7 novembre